 Le changement de destination des locaux comme motif légitime et sérieux du congé donné par le bailleur

Si quitter le logement principal pour un locataire est une simple formalité, il en va autrement lorsque le bailleur souhaite lui donner congé, à l’exception de quelques hypothèses marginales (décès du locataire, abandon du domicile, rupture judiciaire). En effet, en principe il devra répondre à des conditions très strictes qui ne pourront se voir atténuées par une clause du bail. A défaut, la nullité sera constatée.
Les locations d’habitation soumises à la loi du 6 juillet 1989, notamment dans son article 15, dispose que le bailleur ne pourra donner congé qu’à l’expiration du bail, et ce moyennant un préavis de 6 mois avant son terme. Ce congé devra être donné par lettre recommandée avec accusé de réception ou par acte d’huissier.
La Loi Macron du 6 août 2015 énonce 3 motifs pour lesquels le bailleur pourra donner congé à son locataire.
1) La reprise personnelle du bien (pour le compte du bailleur personne physique, celui de sa compagne, ses ascendants ou toutes autres personnes y ayant intérêt au vu de la situation personnelle du bailleur).
2) La vente du bien (une priorité devra être donné au locataire qui dispose d’un droit de préemption sur le bien mis en location pendant les deux à quatre premiers mois du congé).
3) Les motifs légitimes et sérieux en cas de faute ou non du locataire dans ses obligations.
Ce dernier point soulève quelques interrogations, notamment la plus importante, qu’est-ce qu’un motif légitime et sérieux. C’est les juges par leur appréciation souveraine qui vont établir une liste jurisprudentielle de ce qu’est un motif légitime ou non au vu de la situation du bailleur.
Concernant la question du changement de destination des locaux au profit de bureau à destination de l’activité du bailleur, il a été admis par les juges du fond comme motif légitime et sérieux pour donner congé à son locataire. Cependant si la jurisprudence l’a admis en raison d’éléments de preuve en ce sens, notamment au vu de l’accroissement de l’activité de la société bailleresse qui a besoin de nouveaux locaux pour assurer son activité (CA Paris 6 octobre 2016, n°14/07172), il en ira autrement si aucune justification n’est avancée autre que celle pour simple convenance personnelle (CASS, 3ème civ., 29 janvier 2002).
Faute du locataire (inexécution d’une de ses obligations contractuelles comme le défaut de paiement des loyers, le défaut d’assurance, les troubles de jouissance …) ou non (besoin de travaux qui nécessite départ du locataire, changement de destination…), le bailleur dispose donc de moyen pour donner congé.
Il faudra cependant que le bailleur ne se rende pas coupable de fraude, cette dernière corrompant tout. C’est le cas notamment si a posteriori le bailleur ne vend pas son bien, ne fait pas de travaux ou ne s’établi pas personnellement ni professionnellement dans les locaux litigieux. A cet occasion, l’ancien locataire pourra demander des dommages-intérêts.